Eglise Saint-Patrice

L’église St-patrice résulte d’une antique fondation sur le même emplacement. Au Xe siècle, un oratoire initialement à l’extérieur de la ville était déjà dédié au patron de l’Irlande. Les Normands possédèrent longtemps des relations commerciales avec cette contrée, ce qui influença peut-être le choix du vocable.
Détruite en 1228 par un incendie qui dévasta également tout le voisinage, l’église fut entièrement réédifiée. Elle se retrouva bientôt englobée dans la nouvelle enceinte de la ville. En effet, vers le début du XIIIème siècle, la rue St-Patrice suivait le tracé des nouveaux remparts de Rouen situé au niveau de l’actuel boulevard de la Marne. De nos jours, quelques vestiges de ces murailles et des jardins suspendus subsistent aux alentours.
L’église fut de nouveau totalement rebâtie en 1535 dans un style gothique flamboyant.
St-Patrice devint progressivement l’une des paroisses les plus huppées de Rouen et accueillit de nombreux notables. Ceux-ci s’installèrent dans de somptueux hôtels particuliers. Il s’agissait surtout de parlementaires car l’Echiquier était devenu permanent au début du XVIe siècle.

St-Patrice fut pillée en 1562 par les Huguenots.
En 1592, son clocher fut percé par des boulets de canon lors du siège de la ville soutenu par les catholiques de la Ligue contre les armées d’Henri IV et ses alliés. En cette année 1592, mourut Martin Hébert, curé de St-Patrice devenu “l’honneur du clergé”. Ce prêtre de choc, armé d’une hallebarde, tua dix-sept ennemis Huguenots avant de mourir l’arme à la main, atteint de trois coups de pique.
Au milieu du XVIIe siècle, Pierre Chrétien, curé de St-Patrice, décida de fonder la communauté de St-Patrice avec onze autres prêtres. Appelée également séminaire de St-Patrice, cette “Société de Prêtres” était installée autour de l’église paroissiale.
Entreprise dès 1648, une importante extension fit ajouter une construction qui constitua la nouvelle façade sud et permit d’élargir considérablement le chevet. La réalisation avait été prévue pour s’aligner le long de la rue St-Patrice et modifia considérablement l’ampleur du monument.
Divisée en trois nefs, voûtées de bois à l’origine, l’église possède une nef centrale et deux nefs latérales. La disposition en triple vaisseau se révèle analogue à celle des églises rouennaises St-Godard et St-Vivien.

Il n’y a pas de transept, mais les bas-côtés ont été doublés au niveau du chœur par deux chapelles. L’église ainsi bâtie aux XVIe et XVIIe siècles avait une forme de trident.
La tour du clocher date du XVIIe siècle. Cette tour quadrangulaire est épaulée de contreforts terminés par des chapiteaux corinthiens. Un ravissant lanternon lui fut ajouté en guise de clocher.
L’église fut des treize paroisses conservées en 1791. Fermée en 1793, elle fut rendue au culte catholique en 1802. Entre temps, elle avait été occupée par la secte philosophique des Théophilanthropes.
Le portail principal a été restauré au XIXe siècle par l’architecte Eugène Barthélemy.

 
Clergé
En 1770, le clergé se composait de 11 personnes :
7 prêtres
4 acolytes
En 1834, le curé était M. Lesueur, 24, rue Saint-Patrice.
 
Mobilier
Le chœur possédait un décor classique : un autel principal du XVIIe siècle coiffé, sous le règne de Louis XV, d’un baldaquin en bois doré.
Après la Révolution, le mobilier s’est enrichi de quelques dépouilles provenant d’autres églises rouennaises. Ainsi, la chaire provient de l’église St-Lô.
 
Tableaux
Une série de six tableaux peints par le flamand Martin de Vos sont conservés au Musée des Beaux Arts de Rouen. La série en comportait huit. Deux furent perdus à la suite de la saisie révolutionnaire.
Ils ont été peints à partir de 1562 (le premier porte cette date) et forment donc la suite la plus ancienne peinte pour une église de Rouen.
1 - Eliézer et Rebecca à la fontaine.
2 - Eliézer demande Rebecca en mariage pour Isaac.
3 - Laban présente Eliézer à son père.
4 - Laban va chercher Eliézer à la fontaine.
5 - Les adieux de Rebecca à sa famille.
6 - Rebecca consent à suivre l'envoyé d'Abraham.
Eliezer demande Rebecca en mariage pour sa fille Eliezer et Rebecca à la fontaine
Laban présente Eliezer à son père Laban va chercher Eliezer à la fontaine
Les adieux de Rebecca à sa famille Rebecca consent à suivre l'envoyé d(Abraham
L'église possède aussi deux tableaux de la Passion de l’Ecole du Bassan.
Après la Révolution, elle a récupéré une réplique de la fin du XVIIe siècle d’un tableau du Normand Nicolas Poussin (1594-1665) saint Pierre et saint Jean guérissant un boiteux. Il provient de l’église Notre-Dame-de-la-Ronde de Rouen.
Un tableau attribué à Arthus Wolffort, l'Adoration des Mages, a été mis en dépôt dans l'église Il provenait de Saint-Pierre-l'Honoré.
On y trouve aussi Le Christ chassant les vendeurs du Temple, anonyme français du XVIIe siècle, offert par Charles Lambert.

L'Adoration des Mages

Le Christ chassant les vendeurs du Temple

 
Vitraux

L’église St-Patrice est surtout réputée pour ses superbes vitraux, en particulier ceux du côté gauche du chœur. Les plus remarquables verrières furent exécutées de 1538 à 1625, en deux temps, sous les règnes de François Ier, Henri II et Louis XIII. Les plus connus sont Le Triomphe du Christ (vers1540), L’Annonciation (1540) , La légende de saint Eustache (1543), La Femme Adultère (1549), L’Histoire de Job (1570) et la Vie de saint Patrice (1583).
Des vitraux provenant de l’église Sainte-Marie-la-Petite et de Saint-Godard occupent des fenêtres du collatéral sud. Un autre vitrail provient de l’église de Lintot (Seine-Maritime).

Voir les vitraux sur Rouen-Histoire

 
Orgues

L'orgue de tribune a été construit en 1662 par Claude de Villers et achevé par son fils en 1666.
Le buffet est l'œuvre de Robert Barnabé et du sculpteur Noël Jouvenet.
Le président du Parlement, monsieur de Motteville, illustre et généreux paroissien de St-Patrice, contribua à financer sa remise en état à la suite du grave sinistre par des subsides non négligeables, dès 1668.
Il a été restauré en 1678 par Marin Ingout, en 1790 par Godefroy, vers 1832 par Henry, en 1858 par Cavaillé-Coll, en 1876 par Krischer. L'instrument a été inauguré en 1882.
Entre 1953 et 1955, il a été refait par Merklin et inauguré le 6 avril 1956 par Pierre Cochereau.
Il a été restauré en 1987 par J.-M. Cicchero.

L'orgue de chœur a été construit en 1895 par Debierre.

 
Cloches

Le clocher possédait trois cloches.
La plus ancienne était datée de 1774. Elle donne le fa. Elle portait un Christ, une Vierge et un évêque. Détériorée en 1881, elle a été remplacée par une cloche plus importante nommée Pauline-Eugénie, bénie le 19 avril 1882. Elle porte les armoiries pontificales, de l'archevêque et de ses parrains accompagnés des images du crucifiement, de la Vierge, de la résurrection et du sacré Cœur. Elle avait été fondue par A. Havard, de Villedieu.
Les deux autres cloches ont été fondues en 1819 par Caplain père, de Couronne. La plus grosse donnait le sol et se nommait Marie-Anne. L'autre donnait le là et se nommait Marie-Caroline-Stéphanie.

 
Confréries

Les confréries étaient nombreuses dans l’église.
La confrérie de la Passion fut instituée en 1374 à St-Patrice. Elle donna ses premières représentations théâtrales ou “Mystères” (théâtre religieux inspiré des Saintes Ecritures) dès la fin du XVe siècle. Elle fut abritée par St-patrice jusqu’à la Révolution. Elle rivalisa avec le célèbre “Puy des Palinods”, plus ancien et siégeant au couvent des Carmes de Rouen.
 Confrérie de St-Fiacre pour les aiguillers-épingleurs-treillageurs.
Confrérie de la Nativité de la Vierge pour les couteliers-graveurs sur fer et acier.
Confrérie du saint Sacrement.
Confrérie de saint Yves pour les avocats et procureurs

 
Localisation


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Bibliographie
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© Copyright Jacques Tanguy, février 2013