Eglise Sainte-Madeleine
L'ancien Hôtel-Dieu

Le premier Hôtel-Dieu de la Madeleine se situait près de la cathédrale, en face du portail de la Calende. Il occupait une portion du territoire peu étendue de la paroisse de St-Etienne-la-Grande-Eglise.
Son ancienneté était grande. S’il est connu comme “Hôpital Notre-Dame” dans une charte de 1197, il était là bien avant, sous la tutelle des archevêques et du clergé.
Des religieuses s’y installèrent vers 1145. La communauté suivait la Règle de saint Augustin. A ses débuts, elle était mixte, particularité qu’elle partageait, par exemple, avec celle de l’abbaye de Fontevrault. Il lui fut adjoint par la suite une cure de Ste-Madeleine, considérée comme paroisse.
Au moyen âge et à la Renaissance, la peste était quasiment constante à Rouen. En 1537 on réclame déjà la construction d’un Lieu de santé. Le lieu-dit Jéricho, à l’est de Rouen est rapidement écarté et on décide, en 1569, l’achat de la propriété du Général des Finances Prudhomme qui devint le Lieu d’Event avant de devenir le Lieu de Santé. On y fit des constructions sommaires en 1592. La peste continuant à faire des retours cycliques, l’Hôtel-Dieu étant ravagé par un terrible incendie en 1624, décision fut prise en 1654 de construire deux hôpitaux sur le Lieu de Santé, St-Louis pour les malades, et St-Roch pour les convalescents. Le projet initial que fut qu’incomplètement réalisé. Les épidémies avaient diminuées d’intensité et les locaux servirent même à des usages biens éloignés de la fonction d’origine : prison, magasin à grains, logement de victimes d’inondations…

Le transfert de l’Hôtel-Dieu des alentours de la cathédrale vers le nouveau site ne se fit qu’au milieu du XVIIIe siècle, plus d’un siècle plus tard ! La décision en fut prise en 1750 et c’est le 16 juillet 1758, à 3 heures de l’après-midi, que le transfert des malades commença. L’établissement conserva son ancien nom d’Hôtel-Dieu de la Madeleine.

Les bâtiments de l’ancien Hôtel-Dieu formaient un ensemble compact au sud de la cathédrale. Ils s’agrandirent peu à peu au cours de siècles. Au centre, se trouvait un ensemble de cours. A l’ouest était la partie conventuelle avec, sur la rue du Change, les religieux. Les religieuses étaient au sud, sur la rue de la Magdeleine. A l’est, la grande salle des malades s’entendait au long de la rue du Panneret. Elle contenait 80 lits occupés chacun par trois malades. Entre la chapelle et cette salle, se trouvait l’entrée de l’hôpital, avec le logement du portier. La cour du Chariot servait de remise au véhicule utilisé pour le transport des trépassés au cimetière St-Maur.
D’autres salles pour les malades furent construites au delà des rues des Pannetiers et de la Magdeleine. On y accédait par trois ponts établis au-dessus de la chaussée.
L’ancienne église conventuelle était destinée aux religieuses et aux religieux (Chanoines et Chanoinesses Réguliers de St-Augustin) mais aussi aux malades. Elle était parallèle à la rue du Change. Elle avait remplacé en 1508 une primitive chapelle portant le même vocable et se trouvant dans la rue de la Magdeleine et dont nous ne connaissons pas les dispositions. Le dessin de la grande vue de Rouen de Jacques Le Lieur, montre qu’en 1525 on n’avait construit que quatre travées. Les travaux n’étaient pas terminés. Elle fut dédicacée en 1658. On commença à la démolir vers 1779.
Elle comportait en vaisseau de six travées accompagné de bas-côtés. Le chevet, orienté à l’est, était quasiment plat. Sur le dessin de Jacques Le Lieur, il semble comporter deux pans de murs. Les bas-côtés se terminaient de la même façon.
Un petit clocher surmontait le faîte du toit. Il était situé au niveau de la quatrième travée.

 
Clergé
En 1770, le clergé se composait de 37 personnes :
32 chanoinesses-professes
5 novices.
Il y avait aussi 10 chanoines réguliers
 
Tableaux
La communauté possédait un tableau représentant l'Éducation de la Vierge, de Pierre Le Telliers. Il est maintenant conservé au Musée des Beaux Arts.

Éducation de la Vierge

 
Tapisseries
Une tapisserie de Bruxelles représentant La Justice de Trajan, conservée au Musée des Beaux-Arts, provient de l'église de la Madeleine.

 
Vitraux
Les vitraux ont été vendus en 1764 par M. Le Vieil
 
Le nouvel Hôtel-Dieu
Réalisés sur les plans d’Abraham Hardouin, Les hôpitaux St-Louis et St-Roche étaient pratiquement symétriques par rapport à une cour centrale nord-sud. Ils étaient composés chacun d’une grande cour entourée de trois côtés par des bâtiments.
Les architectes de la ville, Fontaine et Parvys furent chargés d’approprier le Lieu de Santé. Ils réunirent les deux hôpitaux St-Louis et St-Roch par une aile nouvelle, surélevèrent les ailes, ajoutèrent une aile au milieu de la cour de St-Roch et construisirent deux pavillons à un étage situés de chaque côté de l’entrée.
Le lieu de Santé possédait une chapelle St-Louis au nord-est de l’hôpital St-Roch. Cette chapelle était devenue insuffisante lorsque tout l’Hôtel-Dieu avait été transféré. On décida la construction d’une nouvelle église, tout en gardant le vocable de Ste-Madeleine.
Comme il était devenu courant au XVIIIe siècle, elle n’était pas orientée. Son chevet s’appuyait sur l’aile centrale de liaison entre St-Louis et St-Roch.
Elle semble être une copie, en réduction, de l’église de la Madeleine de Paris, avec son style grec, son porche à quatre hautes colonnes corinthiennes et à chapiteaux de feuilles d’acanthe édifié de 1773 à 1779. Elle a un fronton triangulaire au décor sculpté, commencé en 1774, et son allure laissent percevoir les mêmes idées néo-classiques.
Les travaux commencèrent en 1754, sur les plans de l’architecte Parvys. Mais les fondations s’effondrèrent à cause du terrain détrempé. Affecté par ce désastre, il se donna la mort le 5 février 1760. La suite de la construction, de 1767 jusqu’à son achèvement, fut menée par l’architecte rouennais Jean-Baptiste Le Brument (1736-1804), secondé par Jean-Jacques Lequeu.
La dédicace eut lieu le 7 avril 1781, par Monseigneur de la Rochefoucauld.
A l’intérieur, derrière le maître-autel, se situe l’ancienne tribune qui permettait aux religieuses d’assister aux offices ou d’y amener directement des malades par un passage communicant avec l’hôpital.
A la croisée, on avait prévu un dôme de pierre. Pour des raisons de sécurité, on y renonça. Le dôme est de charpente, couvert d’ardoises. Il est surmonté d’un obélisque terminé par un globe.
Un petit clocher très archaïque élevé en 1812, surmonte l’abside.
 
A la Révolution, Les hôpitaux changèrent de nom. L’Hôtel-Dieu devint l’Hospice d’Humanité, puis l’Hôpital national de la Montagne. La tourmente passée, il reprit son nom et continua jusqu’en 1988 son œuvre au profit de ceux qui souffrent.Les religieux avaient disparu vers 1789-1790. Seules, les religieuses revinrent et ne se retirèrent définitivement, que vers 1969-1970.
En 1988, la décision fut prise de transférer les derniers services hospitaliers de l’autre côté de la ville, dans l’ancien Hospice Général devenu l’Hôpital Charles Nicolle. Après trois années de travaux, les bâtiments accueillirent la préfecture de la Région Haute-Normandie et de la Seine-Maritime.
L’église de la Madeleine était devenue en 1790 la 37e église paroissiale de Rouen. Fermée pendant la Terreur, elle redevint église paroissiale en 1802. Classée monument historique en 1908, elle a été restaurée il y a quelques années. Elle est désormais intégrée dans l’ensemble paroissial St-Filleul regroupant les anciennes paroisses de l’ouest de la ville.
 
Clergé
En 1834, le curé était M. Vallée, rue de Lecat.
 
Mobilier

Une partie du mobilier de l’ancienne Madeleine est venue enrichir la nouvelle église. C’est le cas de  et des fonts baptismaux, œuvre de marbre veiné d’époque Louis XV du Rouennais Capelle.
Deux vitraux de la chapelle de la Vierge datent du XIXe siècle (1869). Ils représentent saint Pierre et saint Jacques et son dus au verrier Claudius Lavergne de Paris.

 
Tableaux
Deux tableaux du XVIIe siècle sont disposés à l’entrée des collatéraux.
Pour les tableaux anciens, l'abbé Cochet signale  :
Jésus et l'aveugle de Jéricho
Jésus et le paralytique par Vincent
L'Assomption par Pierre
La Conversion de Saint-Paul par Restout.

Guérison du paralytique

 

Guérison de l'aveugle-né

 
 
Vitraux
Un seul vitrail est en place dans l'église. Il est situé dans la partie supérieure du chevet (au nord), dans une tribune qui domine le chœur.
Il représente Dieu le Père la main droite posée sur un globe. Il est entouré d'anges portant divers instruments (gerbe, corne d'abondance, calice) Il semble être daté du XIXe siècle.
Deux autres vitraux historiés seraient encore en attente de repose.

 
Orgues

L'orgue de tribune a été construit à la fin du XVIIIe siècle. Il a été modifié en 1842 par Daublaine et Callinet. Il n'en reste que le buffet.

L'orgue de chœur a été construit vers 1850 par Ducroquet et Barker.
Il a été agrandi en 1873 par Cavaillé-Coll et agrandi au début du XXe siècle par Charles Mutin.
il est actuellement hors service.

 
Cloches
Lorsque l'église avait été transformée en paroisse (1803), on dut établir un clocher et on obtint une cloche de l'église Saint-Gervais nommée Marie-Marthe. Elle datait de 1687. Fêlé, elle a été remplacée par une cloche qui a été bénie le 14 mars 1939. Elle porte le nom de Marie-Michelle-Augustine-Cécile.
 
Localisation


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Bibliographie
Abrégé de l'histoire ... de la ville de Rouen, Lecoq de Villeray, 1759, p. 360-363, 372-375.
Description géographique et Historique,...,
Toussaint Duplessis, 1740, t II, p.54,...
Journal de Rouen,
27 janvier et 3 février 1764.
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Exploration de la Normandie - Rouen
, Walsh, 1835, p. 383.
Album Rouennais, E. Dumée, Ch. Richard, 1847.
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6/3/1869, p. 19.

La Semaine religieuse du diocèse de Rouen
, 30/10/1869, p.835.
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Répertoire archéologique du départ. de la S.-Inf.,
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18/8/1888, p.803-805.
Les cloches des églises de Rouen,
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Rouen, Ville d'art et d'Histoire, Eglises, chapelles et cimetières à travers les âges. Edgard Naillon, T. 1, 1936
Journal de Rouen, 15 mars 1939, p. 3
Journal de Rouen, 20 mars 1939, p. 4
Eglises de Rouen, E. Naillon, 1941, p. 101-103.
Le prieuré Sainte-Madeleine de l'Hôtel-Dieu de Rouen,
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La peinture d'inspiration religieuse à Rouen au temps de Pierre Corneille, M. A. Dupuy, 1984, p.139-140.
Orgues de Normandie, Seine-Maritime, t. II, 1992, p. 190-193.
Rouen, un passé toujours présent, Y. Pailhés, 1994, p. 56-57.
Rouen aux 100 clochers
, F. Lemoine, J. Tanguy, 2004, 168-170.
Monuments de Rouen et du Pays de Caux, Congrès Archéologique 2003, Aude Henri-Gobet, 2005, p. 287-292.
Eglises et chapelles de Rouen, un patrimoine à (re)découvrir, O. Chaline, AMR, 2017, p.141-147.

© Copyright Jacques Tanguy, février 2013